La cartoucherie de Toulouse marque l’entrée de la ville et de la région dans la modernité, dans l’ère industrielle. Un peu avant l’aéronautique, l’industrie de la guerre fut l’espoir d’essor, de progrès et de prospérité ;  elle tenu en son temps ses promesses…

Les coïncidences de l’histoire amènent aujourd’hui ce quartier à marquer le passage à une autre ère : la ville écologique, avec l’éco-quartier qui prendra la place des bâtiments industriels.

Dans ses ruines, ses restes, vivent encore les ombres de tous ces temps passés…100 ans d’histoire.

Aux machines, se dessinaient les existences de ses Toulousains, ouvriers, ouvrières surtout.

L’histoire des usines métallurgiques de Toulouse retracent les bouleversements inhérents à le révolution industrielle que d’autres villes avaient vécu un siècle avant. La naissance d’une classe ouvrière qui n’existait pas ici. La transformation de la ville, l’urbanisation.

Mais cette usine c’est aussi de l’histoire sombre. Et si ces passages ne sont pas cachés, ils ne sont pas connus pour autant.

Lors de la 1ère guerre mondiale, les hommes partis au front, l’industrie ne peut fournir obus, cartouches, grenades aux armées voraces. L’Etat français va commencer, ce qu’il instituera lors de la seconde guerre mondiale, à fournir aux usines des contingents d’hommes venus de l’autre bout du monde, des Annamites, vietnamiens en majorité, cambodgiens, laotiens malgaches… Pendant la deuxième guerre mondiale vingt milles indochinois ont été amenés en France parfois contre leur gré, pour suppléer les travailleurs mobilisés. On les a appelés les "soldats -ouvriers" (Linh tho). Au 1er octobre 1918, ils étaient encore 42 840 employés dans divers secteurs de l'industrie militaire. Après leur démobilisation, certains se sont reconvertis dans l'industrie civile et dans l'artisanat. Malheureusement, il n'existe aucune statistique permettant de se faire une idée du nombre respectif de ceux qui se sont implantés en France et de ceux qui ont regagné leur pays d'origine à plus ou moins brève échéance.

 

« On savait que la situation des "indigènes" dans les colonies n’était pas enviable ; on découvre que la France d’alors n’était guère plus accueillante. Bien sur, certains diront que "c’était la guerre" et que la vie des français n’était guère meilleure à cette époque. En réalité, il faut reconnaître que ces hommes ont été exploités pendant des années par la France de l’époque, tant par le régime de Vichy que par la France libérée. »

 

Les toulousains et toulousaines ont été pour certains accueillants. Pendant leurs heures de liberté, avant le couvre-feu, certains Annamites étaient invités dans les familles.

Et certains se sont aimés.

Dans ces ruines se chuchotent encore des mots doux,  battent en douce des œillades bridées.

 

cette histoire est aussi la mienne. Le départ d’une branche de l’arbre généalogique sinueux de ma famille sur laquelle, assise bien calée, j’ai pu voir combien certain ont eu du mal à s’y accrocher…tellement mal qu’il leur a fallu cacher, faire de cette branche un secret. Une graine d’arbre exotique que cet homme annamite a planté avant de repartir, comme une bonne partie de ses compatriotes arrachés eux-aussi à leur branche d’origine pour être installé sous nos platanes. Il a laissé mon grand-père. Qu’a-t-il emporté de nous ?

peut-on  dire qu’il y a une constante, une équation humaine qui sauve l’image de l’humanité, élève les préoccupations au-delà des canons, de la poussière de métal, et universalise tout d’un regard : un homme d’où qu’il vienne, une femme d’où qu’elle vienne et l’amour ?

J’aime croire que c’est ça aussi l’histoire de l’humanité.

 

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